Entretien avec le Dr Catherine Garrel

Praticien hospitalier, CHU de Grenoble, département de Biologie-Toxicologie-Pharmacologie, Unité fonctionnelle de Biochimie-Hormonologie Nutrition, responsable du laboratoire de stress oxydant, membre consultant de la Société française de Nutrition du sportif (SFNS)

Les sportifs réclament des compléments alimentaires, et en particulier des omégas-3, pour améliorer leur performance. Que sont les omégas-3 et quelle est votre position sur ce sujet ?

Les omégas-3 sont des acides gras polyinsaturés, c’est-à-dire des acides gras à longues chaînes hydrocarbonées possédant un certain nombre de doubles liaisons. Les trois principaux sont : • l’acide alpha-linolénique (ALA) qui est le précurseur ; • l’acide eicosapentaénoïque (EPA) ; • l’acide docosahexaénoïque (DHA)

L’acide alpha-linolénique (ALA) est dit “essentiel” car l’organisme en a besoin mais ne peut pas le synthétiser. L’EPA et le DHA peuvent être synthétisés à partir de l’ALA mais pas en quantité suffisante pour répondre aux besoins de l’organisme. C’est donc par le biais de l’alimentation que ces acides gras, et en particulier l’ALA, sont apportés à l’organisme. On trouve l’ALA surtout dans l’huile de colza, l’huile de lin, l’huile de noix, l’huile de soja, les noix, les algues et dans certains végétaux comme la mâche, la laitue, le chou et les épinards, alors que l’EPA et le DHA sont apportés par les poissons gras, en particulier ceux vivant dans les eaux froides et en liberté (saumon, sardines, maquereaux, morue).

Les omégas-3 possèdent de nombreuses fonctions. Ce sont des constituants fondamentaux des membranes cellulaires. Ils jouent un rôle important sur l’équilibre, l’architecture, la fluidité et la formation de ces membranes, en particulier au niveau neuronal. L’EPA et surtout le DHA représentent un tiers de la structure membranaire du cerveau. Les omégas-3 participent au renouvellement des gaines neuronales et contribueraient au maintien de certaines fonctions cognitives comme la mémoire, la capacité de concentration et d’apprentissage, jouant ainsi un rôle sur le bienêtre mental et sur la dépression. Ils agissent également sur l’élasticité des vaisseaux sanguins, sur la régulation de la tension artérielle, du rythme cardiaque et du système immunitaire, et sont dotés de propriétés anti-inflammatoires, antiarythmogènes, anticoagulantes et vasodilatatrices. On attribue donc aux omégas-3 de nombreux effets bénéfiques sur la santé, surtout au niveau du système cardiovasculaire.

Depuis la constatation dans les années 1970 de la faible prévalence des maladies cardiovasculaires chez les esquimaux, très grands consommateurs de poisson, donc d’acides gras polyinsaturés, de nombreuses études scientifiques et cliniques ont permis de conclure qu’une carence en omégas-3 augmentait les risques de mort subite d’origine cardiaque et que la consommation régulière et à dose physiologique de poissons et d’huiles riches en omégas-3 était un facteur efficace de protection vis-à-vis des risques cardiovasculaires et des problèmes d’arythmie.

En revanche, les essais cliniques de prévention cardiovasculaire à base de suppléments ont donné des résultats divergents et les bienfaits supposés des omégas-3 en tant qu’outil de prévention cardiovasculaire globale n’ont donc pas été réellement prouvés. Ils pourraient d’ailleurs être remis en question par une métaanalyse concernant 70 000 patients, publiée en 2013 dans The Journal of American Medical Association (JAMA), qui ne retrouve un effet protecteur global que très modeste. Pour certains auteurs, il se pourrait que les effets d’une supplémentation en omégas-3 puissent n’être liés qu’à la correction de déficits d’apports dans les populations cibles. Ce qui fait qu’à l’heure actuelle, en France, une seule autorisation de mise sur le marché (AMM) a été accordée aux oméga-3 dans le cadre du traitement adjuvant en prévention secondaire de l’infarctus du myocarde, en association avec les traitements de référence.

Quoi qu’il en soit et jusqu’à preuve du contraire, les omégas-3 sont dotés d’effets bénéfiques pour la santé, et l’organisme ne doit pas en être déficitaire. Des études ont en effet montré qu’un déficit en omégas-3, outre les problèmes cardiologiques, peut entraîner des comportements dépressifs, de la fatigue, des pertes de mémoire, des troubles de la circulation sanguine.

L’OMS conseille une alimentation riche en omégas-3, et en particulier la consommation de poissons gras deux à trois fois par semaine. Les apports nutritionnels recommandés (ANR) en France sont de 2 g/jour (2 g/j chez l’homme et 1,6 g/j chez la femme), ce qui correspond en fait à une alimentation équilibrée puisqu’il est reconnu qu’une cuillère à soupe d’huile de colza renferme 1,3 g d’omégas-3 au même titre que 70 g de saumon sauvage, qu’une poignée de noix ou que 120 g de thon.

Néanmoins, il est conseillé de ne pas dépasser des doses journalières ou tout au moins 3 g/j, car il a été prouvé que la consommation d’omégas-3 en excès et à long terme, en dehors d’une indication particulière, est à l’origine de problèmes de coagulation et de risques hémorragiques accrus, d’une baisse de la glycémie, d’une augmentation des taux de cholestérol (LDL)et d’une diminution des réponses immunitaires et inflammatoires.

Il est reconnu que les omégas-3 sont bénéfiques pour la santé lorsqu’ils ne sont pas en excès dans l’organisme.

Comment évaluer si un individu est déficitaire ou excédentaire en omégas-3 ?

Certains nutritionnistes, micronutritionnistes ou diététiciens, préconisent des questionnaires alimentaires pour évaluer le statut en omégas-3 d’un individu. Or, il est clairement reconnu par la communauté scientifique, et cela pour différentes raisons (qualité de l’aliment ingéré, qualité d’émulsion des lipides absorbés, état du statut enzymatique, de la fonction digestive et de la capacité d’absorption de l’individu, de son état inflammatoire…), que le contenu de l’assiette est très mal corrélé aux taux de nutriments qui sont retrouvés au niveau sanguin.

C’est pourquoi l’évaluation du statut en acides gras polyinsaturés, et en particulier en omégas-3, ne peut se faire que sur la base de bilans biologiques spécialisés, appelés bilans ou profils d’acides gras polyinsaturés.

Quelques laboratoires d’analyses médicales sont capables de réaliser des profils d’acides gras polyinsaturés plasmatiques (qui reflètent la qualité des apports alimentaires) et érythrocytaires (qui reflètent le statut en acides gras des membranes) et ainsi de déterminer les concentrations plasmatiques et érythrocytaires en omégas-3.

En revanche, il n’existe pas de valeurs seuils plasmatiques et érythrocytaires standardisées et reconnues comme hautes ou basses. Chaque laboratoire a ses propres valeurs normales et contrairement à certains marqueurs de la biologie classique, il n’y a pas de standardisation interlaboratoire des valeurs normales. Le statut en omégas-3 d’un individu est donc évalué en fonction des valeurs normales du laboratoire qui doivent être rigoureusement réalisées sur un nombre important d’individus sains, exempts de toute supplémentation et ayant une alimentation saine et équilibrée, apportant notamment 2 g d’omégas-3 par jour conformément aux ANR.

Les omégas-3 sont-ils importants pour le sportif ?

Étant donné que les omégas- 3 sont des composants structuraux fondamentaux des membranes cellulaires et qu’ils participent ainsi à la solidité de ces membranes, donc des cellules, qu’ils ont des effets cardioprotecteur, antidépresseur et antiinflammatoire, qu’ils interviennent dans la réponse immunitaire, dans le maintien des fonctions cognitives, il est clair qu’ils possèdent un certain nombre de fonctions particulièrement intéressantes et bénéfiques pour le sportif. Un statut optimal en omégas-3 chez le sportif va donc favoriser une optimisation de son état général et mental, et donc, par voie de conséquence, contribuer à de meilleures performances sportives et peut-être minimiser le risque de blessure du fait de son implication sur la structure des membranes cellulaires.

Que doit retenir le médecin chargé de conseiller les athlètes ?

Du fait de leurs nombreux effets bénéfiques, les omégas-3 constituent une catégorie de lipides indispensable à la santé physique et mentale des sportifs. Il est donc important que les sportifs aient une alimentation équilibrée qui leur apporte une quantité journalière d’omégas-3 préconisée par les ANR et qui semblerait suffisante, pour un grand nombre de sportifs, pour pallier leurs besoins et qu’il ne soient pas en déficit.

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